Mrs Recht's Classroom

Séquences et ressources pédagogiques pour enseigner l’anglais au collège.

 

La participation orale #unpopularopinion

La participation orale
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La participation orale est notre coeur de métier. Au quotidien nous voulons faire parler les élèves. Mais comment faire ? Je partage avec vous mon expérience sur le sujet et surtout mon opinion, qui ne plaira pas à tout le monde. Vous êtes prévenus :).

La participation orale

Avant, je notais la participation orale.

Religieusement.

J’avais même un système bien rodé : des colonnes dans mon carnet de notes, des croix à chaque prise de parole, des points bonus pour les interventions pertinentes, parfois des malus pour les bavardages. J’ai aussi testé les bâtonnets avec les prénoms des élèves, pour que chacun passe, comme à la loterie. Ou les cartes de couleur à lever selon le niveau de certitude — pour essayer d’impliquer même les timides. Je voulais valoriser l’investissement, encourager la prise de parole, prouver que l’oral comptait autant que l’écrit. Et puis, il faut bien l’admettre, cette fameuse note de participation me dépannait parfois quand il manquait une évaluation. Cela fonctionnait un temps, puis la motivation s’étiolait.
De plus, avec l’âge sans doute, j’ai commencé à douter de l’efficacité et de la justesse de ce système qui me posait problème.

Ce que je croyais faire…

Je pensais motiver mes élèves à s’exprimer davantage, leur montrer que leur voix comptait, et leur offrir un terrain d’expression plus libre que les évaluations classiques. J’imaginais que noter la participation permettrait à chacun de “gagner” des points facilement, dans une dynamique bienveillante. Et puis, je voulais valoriser les élèves investis — c’est tout à fait légitime, non ? Sauf que sur le terrain… ça ne s’est pas toujours passé comme prévu.

Ce que je faisais, sans le vouloir

➡️ Je mettais une pression constante sur certains élèves, qui avaient peur d’être jugés ou de ne pas savoir.
➡️ Je renforçais les inégalités, car certains élèves extravertis, confiants ou plus à l’aise en langue occupaient l’espace — tandis que d’autres, pourtant très investis autrement, restaient sur mon carnet.
➡️ Je transformais la participation en performance. Et parfois en compétition.

Et au fond, est-ce qu’on “participe moins” quand on ne parle pas ? Ou simplement autrement ?

J’ai arrêté de noter… et j’ai commencé à observer autrement

Petit à petit, j’ai fait évoluer ma posture. J’ai remplacé la note par des encouragements concrets, des stratégies ciblées et un regard plus large sur ce qu’est la participation. J’en parlais récemment justement dans le traitement de l’erreur.

La participation orale , ce n’est pas seulement lever la main.

C’est aussi :

  • écouter activement ;
  • prendre des notes avec attention ;
  • faire ses devoirs sérieusement et régulièrement ;
  • poser une question pertinente ;
  • aider un camarade discrètement ;
  • reformuler une consigne pour un autre.

Et tout cela mérite reconnaissance.

Encourager sans mettre en compétition

Alors, j’ai peu à peu changer de système en instaurant un climat de confiance, où parler ne rime pas avec performance. Où on peut se tromper, chercher ses mots, bégayer, hésiter — et être valorisé pour ça. Par exemple, j’ai utilisé des outils comme :

  • les “petits défis” oraux collectifs (à voix basse, en binôme, en groupe) ;
  • le droit de “passer son tour sans justification” ;
  • des bilans en fin de séance pour se questionner : “Comment ai-je participé aujourd’hui ?”

J’offre des retours personnalisés à l’oral, parfois à l’écrit, mais plus de points à cocher, plus de croix à accumuler. En outre, en tant que professeur principal, j’ai toujours consacrer au moins une séance à travailler sur cet aspect de participation.

Alors, comment évaluer l’oral ?

Quand il s’agit d’une tâche orale définie (je présente un personnage, je raconte une anecdote, je prends part à un débat), oui, là j’évalue, avec une grille claire, souvent partagée en amont. Et l’entraînement à l’oral est bien présent dans ma pratique. Mais la participation orale spontanée du quotidien ? Je l’observe, je l’encourage, je l’accompagne. Je ne la sanctionne pas. Et je ne la note plus.

En conclusion

Pour conclure, mon objectif est de faire de la participation orale une opportunité mais pas une obligation, un plaisir aussi. Est-ce que tous mes élèves participent plus ? Peut-être pas. Mais je crois qu’ils participent mieux. Avec plus d’authenticité. Avec plus d’écoute. Avec moins de peur. Et si c’était ça, le vrai pari de l’oral en classe : en faire un terrain d’essai, pas un terrain d’élite ?

7 commentaires

  • Gwen dit :

    Merci pour ce témoignage! Cela fait des années que je ne note plus la participation, depuis que lors de ma première inspection, l’inspecteur que j’avais trouvé très bienveillant m’avait dit « la participation n’est pas une activité langagière évaluable, ce n’est ni une vraie prise de parole en interaction car trop bref, ni de la prise de parole en continu. De plus, un élève peut être très timide et ne pas oser parler devant tout le monde sans une préparation préalable mais être très investi, écouter avec attention, réfléchir à ce qu’il entend… alors qu’un élève peut somnoler pendant 40 minutes et sentant la fin de séance approcher il va lever la main pour participer de manière pas nécessairement pertinente juste pour avoir son point ». Et bien depuis j’ai arrêté et je trouve en plus que je suis beaucoup plus attentive à ce que les élèves me disent en ne devant pas mettre un point, une croix ou autre symbole devant un nom … Mais en effet il faut essayer d’impulser une dynamique de participation en classe autrement, et ce n’est pas toujours simple, mais en évaluant la participation non plus finalement.

  • Laporte Sophie dit :

    Merci pour cette réflexion que je partage complètement. Je fais en plus un aveu qui aujourd’hui me déculpabilise (après 30 ans de classe 🙂 ) : je suis incapable d’être ‘présente’ à ma classe et mes élèves quand j’ai en plus une fiche / des points à noter ou ce genre de bilan à pourvoir à chaque heure… Je suis dans l’écoute, la motivation, la disponibilité et … le fun !! On rigole, on échange, ils apprennent aussi de ma décontraction : role model, je suis détendue, ils sont détendus et disponibles pour participer … on a trop peu de temps face à eux / déjà bien trop d’administratif à gérer / pour en plus ‘créer cette note très artificielle.
    Sophie

  • Stéphanie, Toulouse dit :

    Merci pour votre honnêteté, Estelle. C’est rare de lire ce genre d’écrit qui ose dévoiler les failles, qui partage les échecs. Je me sens, grâce à vous, plus légitime dans ma pratique et dans mes choix.

  • Edwige dit :

    Bonjour et merci pour ces réflexions. J’en suis arrivée pratiquement à la même conclusion. Je ne note plus la participation orale. En revanche , je mets des encouragements dans les carnets des élèves sérieux même s’ils ne participent pas beaucoup à l’oral et lorsque qu’un élève timide fait un effort particulier ou un élève faible participe de façon pertinente, il a droit à un sticker ou autre cadeau à la fin de la séance et ça , ça les booste vraiment et ça donne envie aux à la prochaine séance d’obtenir aussi un cadeau. 😊.

  • Celine dit :

    Je pense que tu te rendras compte que ta remarque n’est pas « unpopular » du tout. C’est même souvent partagé par des professeurs, qui étaient autrefois de grands timides 🙂 Je trouve ces questionnements complètement pertinents, et il y a un mois, quand j’ai été inspectée et que l’inspectrice m’a montré mon plan de classe avec les fameuses « croix » selon le nombre de fois où chaque élève avait participé, j’avoue que j’ai vite compris que notre vision du sujet n’était malheureusement pas la même.

  • Cécile dit :

    Bonjour,
    Je partage votre opinion. Un élève qui a peur est de toute manière un élève qui n’est pas en état de parler, ni d’écrire.
    Pour les inciter à participer, j’utilise des jeux de chaîne du style « I have who has » (déclinés avec toutes sortes de thèmes) et des saynètes de théâtre qui leur permettent de parler réellement, de mémoriser des structures de phrases idiomatiques. Dans les deux cas, ils sont plutôt motivés (même des groupes réfractaires).

  • Liadouze dit :

    Merci beaucoup pour cet article, votre vision est très éclairante et me fait réfléchir ! Je fais les îlots bonifiés depuis plus de 10 ans et je ne retournerai pas en arrière mais c’est vrai que les élèves sont toujours en mode « challenge » en participation pour avoir des points. Ils trouvent cela motivant et très dynamique et souvent les retours sont positifs en fin d’année avec des élèves qui me disent qu’ils n’avaient jamais osé prendre la parole et là ils n’avaient pas le choix avec leur îlot…donc ils se sont lancés. En vous lisant, je me dis que je les pousse beaucoup et c’est sûrement oppressant pour certains…et cela m’embête aussi…y a t il vraiment une bonne méthode ? Anne-Laure

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