Adopter une pratique réflexive est essentiel dans notre métier mais c’est aussi une posture compliquée. Pourquoi ? Car nous manquons souvent de temps pour nous poser les bonnes questions. Voici quelques conseils pour adopter une posture réflexive et des exemples concrets.

Pratique réflexive : mon rituel de juillet
Chaque mois de juillet, avant de partir en vacances d’été, je prends toujours du temps pour mettre mes idées en ordre. Cette phrase de réflexion m’est essentielle pour partir l’esprit tranquille. Après 10 mois de cours, c’est toujours un moment clé pour moi. Je liste ce qui a marché, ce qui n’a pas fonctionné ; je réfléchis aux changements effectués sur l’année en essayant de savoir s’ils se sont révélés judicieux. Evidemment, je ne passe pas tout en revue. Je manque comme vous de temps. Alors, comme pour tout j’ai un système. Que je vous montre et explique ce matin.
Un tableau de suivi
Pour m’organiser dans cette pratique réflexive, j’ai créé un tableau de suivi pour mes séquences. En fonction de mes objectifs, j’ajoute ou je retire des colonnes. En bout de ligne, j’ai une colonne bilan. J’y note si la séquence a globalement fonctionné, si elle requiert des améliorations ou si elle doit être “abandonnée”. Ce tableau est complété tout au long de l’année : lors de la création de la séquence, pendant qu’elle est présentée aux élèves. J’y reviens plus longuement en juillet pour y intégrer des détails.
Un exemple concret
En réfléchissant à la séquence Resolutions proposée en 3e, j’ai dû faire des modifications. D’une part parce que je voulais ajouter de l’interaction et de la manipulation à la séquence. D’autre part, je voulais qu’elle soit plus complète et surtout adaptable à mes 2 classes. Car l’une avance vite, l’autre a besoin de plus de temps. Alors j’ai suivi mon tableau et nous avons mis à jour cette séquence avec de nouveaux objectifs.
Pratique réflexive : une posture
Le plus dur dans la posture réflexive est de se montrer objectif envers soi-même. En tant que prof, nous sommes souvent perfectionnistes et souvent très mauvais juges de nos propres actes. Comment faire dans ce cas pour réfléchir objectivement et juger notre travail sans nous dévaloriser ?
Des critères objectifs
J’ai listé une série de questions à me poser pour chaque séquence. Faciles. Claires. Sans détour. Des critères très binaires. En fin de séquence, rapidement, je vérifie que je peux répondre par l’affirmative à la majorité d’entre elles. Dans ce cas, je garde la séquence. C’est très simple. Bien sûr je pourrais entrer dans les détails, me poser des dizaines de questions et pinailler à l’extrême. Après tout c’est sans doute ce qu’un inspecteur fait. Mais j’ai appris avec le temps que cela ne servait qu’à me démoraliser et ne faisait pas de moi une meilleure professeure. Comme je le disais dans un article récent, j’ai appris à me répéter que si cette séquence fonctionne – et même si elle n’est pas merveilleuse à se pâmer – alors, c’est suffisant.
Des questions à télécharger
Pour toujours avoir ces questions sous la main – car je fais le plus souvent ce bilan au collège pendant l’évaluation de fin de séquence ou la correction de cette dernière – je me suis créé un petit marque-page que je glisse avec le plan de séquence. Qui dit pratique réflexive ne dit pas pratique chronophage ni auto-flagellation. En tous cas, pas chez moi.
Pratique réflexive : une habitude
S’il y a une chose que j’ai apprise au cours de ces … 18 années de carrière, c’est que s’imposer de nouveaux objectifs prend du temps. Et que si vous voulez réfléchir à votre pratique, le plus efficace est de s’y astreindre régulièrement. Oui, mais voilà, s’astreindre à quelque chose de déplaisant ne tient pas dans le temps. J’en veux pour preuve vos résolutions déjà abandonnées #justkidding #sorrynotsorry. Alors, j’ai une petite habitude curieuse que j’ai partagée avec les lecteurs de la newsletter ce mois-ci.
En effet, ce mois-ci nous parlons objectifs. Et s’il est parfois difficile de prendre des “résolutions” et de les tenir c’est souvent parce qu’on veut arrêter de faire quelque chose qui nous plaît mais qui n’est pas bon pour nous. Alors, j’ai détourné les résolutions depuis plusieurs années. Et la question clé est : qu’est ce qui marche et que je veux poursuivre ? Je liste donc ce qui marche. Les petits plaisirs de la semaine, du mois, de la période. Et je cherche à les reproduire. Tout simplement.
Si j’ai un conseil pour tous ceux qui doivent adopter une posture réflexive ou une pratique réflexive, notamment les stagiaires ou les néo-titulaires, c’est de prendre le problème à l’envers. Plutôt que de se poser la question de qu’est-ce qui n’a pas marché – et donc se dévaloriser – posez-vous la question de savoir ce qui a marché. Creusez ! Pourquoi ? Comment faire pour réitérer l’expérience ? Vous progresserez ! Et vous serez fier de vous ! Le prof bashing est devenu un sport national, inutile de jouer contre votre camp, ni contre vous-même !
Un commentaire
Bonjour Estelle,
Merci pour cet article. Ma technique est de laisser des post-its sur mes preps ou polys pour noter ce qu’il y a à modifier pour l’année suivante (une activité à modifier, la fiche de consignes de tâche finale à simplifier, un test qui a été trop difficile etc…). En juin je reviens sur mes classeurs de preps et je modifie ce qui est à changer.
J’aime beaucoup ton idée de poursuivre ce qui a bien marché de reproduire les succès et les petits plaisirs.
Bonnes vacances