La compréhension écrite est le thème que vous avez choisi pour ce dernier article de l’année. Vous avez souligné la difficulté d’entraîner véritablement nos élèves à comprendre un texte à l’écrit. Et vous avez souhaité connaître quelques uns de mes trucs et astuces pour la rendre “funky”. Il est essentiel de préparer de terrain, de le déminer également. Il faut enfin tracer plusieurs chemin vers la destination, au cas où nos élèves se perdraient. Je vous raconte mon quotidien, en 3 morceaux, pour éviter l’indigestion.

Compréhension anticipée : une étape clé
Au cours de ces nombreuses années, j’ai pu constater la nécessité de préparer les élèves à une activité, quelle qu’elle soit d’ailleurs.
Le titre
Mon premier conseil serait de bien anticiper les difficultés, lexicales notamment, de vos élèves avant de leur présenter un document écrit. On dit souvent que le titre est une bonne anticipation. Je plussoie. Sauf en ce qui concerne la presse, dont les titres sont souvent truffés de références culturelles, de jeux de mots et d’ellipses.
Ce qui m’amuse particulièrement c’est quand le titre peut prêter à confusion. En 4e, je souhaitais travailler sur Lamb to the slaughter. C’est une lecture suivie abordable, en lien avec le thème Crimes and Alibis, et l’adaptation de Hitchcock est géniale ! Mais comment anticiper sans TOUT dévoiler ? Nous sommes partis du titre et de deux définitions trouvées dans le dictionnaire pour LAMB et SLAUGHTER. A partir de ces deux mots clés, nous avons émis des hypothèses. Et quelles hypothèses !! Nous avions donc une raison de LIRE et de COMPRENDRE la suite.
Le dictionnaire et les listes de mots
Comme je l’ai déjà dit, en anglais, on nous enseigne à tout faire pour ne pas traduire. On mime, on dessine, on donne des synonymes. Cela a du bon, et cela marche parfois. Pas tout le temps en revanche. En cours de français, quand un mot est nouveau, on le cherche dans le dictionnaire. Oui ! Dans le dictionnaire. Alors, en anglais, dans ma classe, quand il y a un truc qui nous bloque, par-dessus lequel on ne peut pas passer, on prend le dictionnaire, et ça fait un bien fou.
Les élèves en très grande difficulté sont souvent paralysés devant un texte car beaucoup de mots leur sont inconnus. Et c’est décourageant, vous en conviendrez. En plus du dictionnaire, j’utilise des défis-mémoire. Si vous ne connaissez pas, je vous invite à lire cet article qui en détaille le fonctionnement.
Les images et les flashcards
Quasiment pour chaque texte, j’ai recours à une anticipation iconographique. Les élèves apprécient d’abord car lire une image est souvent plus facile ! Pour le professeur, cela permet d’aborder : un peu d’histoire de l’art, le présent be+ing et de retravailler ce fameux there is/are qui bien que tout simple ne veut pas rentrer. Là aussi, chez moi en tous cas, l’entrée est lexicale.
Je projette en général un document iconographique au vidéo-projecteur. Je distribue de manière aléatoire des flashcards en rapport avec le thème aux élèves. Elles sont aimantées grâce à du scotch trouvé chez A*****. La tâche est simple à comprendre mais va nécessiter un premier tri. Quels mots ne sont pas représentés sur l’image ? Quels sont ceux qui le sont ? Où sont-ils ? Les élèves à tour de rôle vont aller légender l’image avec les flashcards. Je peux pousser le vice jusqu’à ne donner QUE la version phonétique 😉
Le nuage de mots
Juste avant d’entrer dans le texte, nous mettons en commun tous les mots que nous pensons pouvoir entendre. Nous le présentons non pas comme un seul nuage, mais comme six nuages en lien avec les WH- questions que nous allons aborder lors de la compréhension globale. Cette dernière étape permet de mettre un peu d’ordre avant d’attaquer la lecture et de garder une trace de nos hypothèses.
L’avantage est double car non seulement ce document nous sert lors de l’anticipation, mais il sera complété tout au long de la lecture : nous enlèverons les mots qui ne figurent finalement pas dans le document, complèteront avec les mots clés repérés lors de la compréhension globale et nous appuierons sur ces repérages pour comprendre le message de l’auteur. Et comme il est visuel ET joli, il fait une très belle page dans le cahier 😉

Le bingo des mots
Une variante notamment très chouette en compréhension orale (mais qui marche tout autant pour la compréhension écrite) est le bingo des mots. Faites tracer une grille de bingo de 3×3, 4×4 ou 5×5 à vos élèves sur leur cahier. Faites-leur noter dans chaque case un mot qu’ils pensent trouver dans le texte. Lors de la lecture, jouez au bingo ! C’est amusant, ludique et une nouvelle fois cela donne envie aux élèves de lire le texte.
Compréhension globale : interactivité
L’objectif de cette deuxième phase au delà de la vérification des hypothèses est surtout, selon moi, une mise en confiance. Le travail ayant été bien préparé en amont, de nombreux mots, phrases, expressions sont retrouvés par les élèves lors de cette première lecture.
5 Ws & 1 H
Classer les informations lues est une phase importante de la compréhension globale car une fois repérés, les mots clés doivent être mis en réseau. Et c’est surtout une technique qui est transférable à tous types de texte, ce qui est bien l’objectif de notre enseignement. Si l’élève comprend comment comprendre, nous avons réussi !
Pour ce faire nous utilisons un code couleur. MAIS, et c’est ce qui me permet de rendre le cours plus vivant, tous les élèves ne cherchent pas la même information. Cela va plus vite aussi. Chaque îlot (ou paire d’îlot) se charge d’un mot interrogatif. Une fois leurs repérages effectués, on va compléter le nuage et expliquer aux autres groupes.
La classe puzzle
C’est une petite astuce amusante et qui permet une véritable responsabilisation des élèves. En revanche, attention, ils vont se déplacer.
Chaque élève va appartenir successivement à deux groupes : au départ au sein de son îlot (dont le nombre de membres va dépendre du nombre de mots interrogatifs que vous aurez) il va chercher les mots clés se rapportant à un mot interrogatif donné. Puis dans un deuxième temps, vous allez former des groupes avec les 5 (ou 6) mots interrogatifs recherchés par vos élèves. Ils vont devoir échanger les informations trouvées. C’est un peu l’étape supplémentaire à la simple recherche et mise en commun au tableau.
La remise en ordre
Un petit truc qui fonctionne bien notamment en lecture suivie est l’appariement texte – image. Et cela fonctionne tant en compréhension orale (lecture offerte) qu’en compréhension écrite. Chaque extrait de votre texte peut correspondre à une image. Soit à une flashcard que vous fournissez, soit à l’illustration du livre que vous étudiez. Faire associer le texte et l’image va obliger vos élèves à ne repérer que des mots clés pour aller vite (j’aime les chronométrer pour cette activité); Et si vous avez bien anticiper sur les images au départ, ils auront plus de facilité à le faire.
C’est une activité que j’ai utilisée notamment sur “I didn’t do my homework because”, pour “A day in the life of a boy” (le livre) ou encore pour un livre biographique sur Rosa Parks trouvé sur le site de Scholastic.
La CE flash
Et une petite dernière pour la route avant de s’attaquer à la compréhension détaillée ? J’aime beaucoup mais cela ne se prête qu’aux textes courts, soyez prévenus. Imprimez un document par îlot (ce peut être le même document ou des documents différents). Accrochez-les face cachée sur votre tableau avec un aimant. Indiquez un nombre ou une lettre pour les identifier. Donnez une consigne simplissime à vos élèves avec 2 ou 3 repérages maximum. Ensuite donnez le départ. Chaque élève de l’îlot en mode-relais va aller lire l’info, prélever puis retourner à son groupe. Ils ont un temps imparti chacun (j’aime donner 30 à 45 secondes, dès qu’ils sont en possession du document). C’est TRES vivant, soyez prévenus également. Mais ils se prennent au jeu et surtout ils s’entraident et lisent POUR trouver quelque chose dans le texte. Ils essaient. Nous l’avons fait cette année notamment en 3e avec les 6 petites annonces des 6 Best Jobs (imprimées en A3)
Compréhension détaillée : finir en beauté
L’objectif de cette troisième et dernière phase est souvent d’arriver à saisir grâce à l’implicite le message de l’auteur et/ou pour nous professeurs de faire repérer dans le texte les faits de langue nécessaires à notre séquence, l’air de rien 😉
Le bingo (encore lui)
En compréhension détaillée, votre objectif est d’entrer plus profondément dans le texte, de fouiller dedans. Vous pouvez corser les choses en donnant un bingo des synonymes, des antonymes, des rimes, des conjugaisons ! C’est un petit exercice facile et surtout ludique qui va forcer vos élèves à vraiment lire et comprendre les mots qu’ils ont jusque là laissé de côté. Cette fois c’est vous qui allez fournir la grille, ou bien l’écrire rapidement au tableau. Les élèves devront trouver les mos choisis par vos soins dans le texte. On peut décliner cette activité à l’envi avec des définitions, de la phonologie. Je ne pourrais plus m’en passer, alors attention si je vous convertis !
Le who's who
J’avoue, c’est sans doute l’activité linguistique au départ la plus barbante du monde. MAIS, les élèves ne maitrisent pas du TOUT les pronoms personnels. Alors j’ai toujours une activité sur les pronoms. Ce peut-être (ça l’est souvent) un concours : qui est le plus important ? Prouve-le. On compte les pronoms personnels sujets, compléments, les adjectifs possessifs … Cela remet un peu les choses en tête et cela en dit long sur le message du texte l’air de rien.
La mise en images
Petit truc qui me plaît beaucoup, mais qui est chronophage : après lecture du texte, je demande parfois aux élèves d’en dessiner un extrait. Cela évidemment ne se prête pas à tous les textes, mais c’est parfois vraiment chouette. Nous venons de le faire sur des extraits de Kensuke’s Kingdom en 5e LCE. Plusieurs passages décrivant l’île ont été étudié par les élèves (un par îlot). Nous avions, comme expliqué plus haut, d’abord fait une entrée lexicale avec les éléments de paysages puis avec les posters WH- nous avons classé les informations données par le narrateur. En guise de compréhension détaillée, ils ont eu à dessiner l’île telle qu’ils l’imaginaient avant de la confronter avec la carte fournie dans le livre. Vraiment, ce fut une réussite.
La mise en voix
Comprendre un texte de manière détaillée cela se traduit, selon moi, par une lecture à voix haute expressive. J’aime aussi terminer l’étude d’un texte par une lecture de quelques phrases. C’est un exercice difficile pour les élèves qui déteste souvent lire à voix haute devant la classe. Lorsque la classe est un peu réticente, j’offre la lecture : une fois, deux fois, trois fois. Quand on aime, on ne compte pas ! Puis ils répètent en chorale, puis en groupe, puis en binôme, puis seul. Et on y arrive !
Pour conclure
J’espère que ces quelques modestes pistes vous auront aidé à trouver de nouvelles idées pour travailler la compréhension écrite en classe. La majeure partie de ces trucs et astuces est aussi applicable à la compréhension orale.
Et parce que je sais que nous sommes nombreux à toujours vouloir trop en faire, je précise : je ne fais pas TOUT ceci pour chaque texte, je ne fais même parfois PAS GRAND CHOSE. Une CE ce peut-être : read the text, select transparent words, say who, where, when, what and why. Et trouver dans le texte un mot qui veut dire …, une structure de phrases qui se répète et BASTA.
3 commentaires
Greeat reading
Merci pour cet article très inspirant. En ce qui me concerne, je me pose toujours la question de l’évaluation de la compréhension (orale ou écrite) : doit-elle se faire en anglais ou en français ? Je crois que la plupart des collègues le font en anglais mais il me semble qu’on nous recommande plutôt le français.
Bonjour Perrine, l’évaluation doit se faire en français – en tout cas c’est toujours ce que j’ai appris et enseigné. En revanche, l’entraînement se fait en anglais.