Mrs Recht's Classroom

Séquences et ressources pédagogiques pour enseigner l’anglais au collège.

Segpa : Enseigner l’anglais

Enseigner l'anglais en segpa
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Table des matières

La SEGPA est un univers souvent redouté des enseignants du général. Pourquoi ? Car y enseigner est souvent déroutant. Et pourtant ! Enseigner l’anglais en SEGPA a été, je le crois, le plus formateur pour moi. Et j’applique depuis lors certaines techniques aux classes de général. Je vous raconte ?

Enseigner l'anglais en segpa

Mes années de Segpa

Tout d’abord, et je crois qu’il est important que vous le sachiez, tout ce que je vais écrire et raconter aujourd’hui est, comme toujours, uniquement issu de mon expérience personnelle. Je n’ai pas suivi de formation particulière sur le sujet, ni n’ai de solution miracle. Et je ne sais pas tout. En revanche, à la lecture de vos nombreux messages récents, je sais une chose : enseigner en SEGPA est difficile et nous n’y sommes, comme trop souvent, pas formés.

J’ai commencé ma “carrière” EN en Segpa : 16h en SEGPA de la 6e à la 3e + 2h de CAP 1ere année en EREA comme TZR. Le décor est planté. J’en ai bavé un peu, j’ai appris beaucoup. Puis dès l’année suivante et pendant 9 ans dans mon établissement REP j’ai enseigné l’anglais à 2 puis 1 classe de Segpa chaque année. Nous les suivions de la 6e à la 3e ce qui fait que j’ai suivi 2 cohortes. Ils avaient les mêmes horaires qu’en général : 4h en 6e et 3h au cycle 4.

Pour résumer ce que j’en ai retenu avant d’entrer dans les détails, je dirais que :

  • ce sont des élèves en grande difficultés et souvent “maltraités” par le système
  • l’anglais leur est TRES compliqué car ils ne maitrisent pas du tout leur langue maternelle au départ
  • nous sommes bien trop ambitieux en anglais, au regard de ce qu’on leur demande en français et mathématiques par exemple

Ceci étant dit, ce sont aussi des élèves :

  • qui comptent sur nous
  • à besoins particuliers, qu’il faut donc traiter comme tels
  • attachants, car leurs histoires personnelles sont très souvent plus douloureuses que nous ne le croyons

Faire cours en Segpa

Faire quoi ?

J’ai essayé de nombreuses combinaisons pour faire cours en Segpa :

  • proposer des séances détachées les unes des autres
  • créer de courtes séquences de deux ou trois séances
  • travailler sur de longs projets sur plusieurs mois
  • axer sur du culturel à gogo
  • travailler dans la perspective actionnelle
  • composer des ateliers autonomes
  • faire une lecture suivie
  • écrire avec des correspondants

Faire comment ?

Et tout fonctionne ! Oui, tout ! A quelques conditions, qu’il m’a fallu apprendre sur le tas, alors je vous fais gagner quelques précieuses heures de prise de tête.

  • Oubliez le tout anglais, transformez l’anglais en challenge “Aujourd’hui, notre défi c’est 10 minutes tout en anglais sans un seul mot de français”.
  • Discutez avec eux, leurs bagages sont lourds dès l’entrée en classe, ils souffrent et sont souvent très mal à l’aise avec les autres, parler anglais dans ces conditions est véritablement une souffrance. Dans ma classe, après un petit rituel donc je vous parle plus base, on passait 2 ou 3 minutes à parler de nos soucis du moment, de ce qu’ils avaient mangé à la cantine, de la bagarre sur la cour, du contrôle de maths …
  • Soyez créatifs dans vos activités mais très réalistes sur vos objectifs, l’apprentissage ne se fait QUE en classe, il n’y a pas de mémorisation. Votre grosse difficulté sera surtout de proposer des activités similaires sur les objectifs linguistiques de la 6e à la 3e SANS que vos documents ne fassent trop bébé pour les 3e et qu’ils soient accessibles.
  • Visez A1+, A2- en fin de 3e et vous pourrez être fiers de vous et d’eux surtout ! Votre progression de 6e et de 5e sont vos repères pour tout le collège en Segpa, la grammaire détaillée en moins. (mais j’y reviens)

Un cours type en Segpa

Un rituel écrit très abordable

Le problème de la majorité de nos rituels est qu’il s’agit de rituels oraux. Or l’oral, pour nos élèves de Segpa, c’est une montagne à gravir. Déjà dans leur propre langue l’oralité est compliqué : problèmes d’élocution, grammaire de l’oral mal maitrisée, vocabulaire parfois pauvre. Ajoutez à cela un accent très compliqué à attraper, des sons difficiles à prononcer, une très mauvaise ambiance au sein de la classe et un manque évident de confiance, et vous avez le combo idéal pour rendre toute activité orale potentiellement explosive dans votre classe.

J’ai donc opté pour un rituel écrit qui visait à fixer l’orthographe d’un mot par séance. Petit objectif, mais objectif atteignable. Et, si vous avez eu des élèves de 6e Segpa, vous savez que la graphie n’est pas maitrisée de tous, ni la lecture d’ailleurs, ni l’alphabet parfois. Et si vous n’en avez jamais eu, je vous le dis, c’est parfois très déroutant.

Mes élèves entraient donc en classe et trouvaient sur leur table au format A5 une fiche mot du jour qu’ils remplissaient dans le calme au cours des 5 premieères minutes. J’en profitais pour faire l’appel, mettre une musique apaisante et aller les voir un par un pour les féliciter (ou les aider si nécessaire). Les minutes suivantes étaient consacrées à notre discussion du jour, en français : “Comment ça va aujourd’hui ? Des trucs à partager ?”. J’écoutais, je les plaignais un peu, les encourageais souvent. Puis un “On est prêt à travailler ? Ready?”. Et on lançait l’activité du jour.

Une activité courte, accessible

Que vous ayiez opté pour des séances détachées les unes des autres ou de véritables séquences, tout doit se jouer dans la classe. Et le choix de votre document est primordial. Ni trop bébé, ni ambitieux, c’est un entre-deux compliqué. Je me suis vite tournée vers les livres pour enfants et les poèmes très courts également. Beaucoup de vidéos sont bien trop bébé pour les 4e et 3e segpa ou bien trop difficiles. Dans ce cas, je bricolais : j’ajoutais les mots clés en sous-titre, je coupais et recoupais la vidéo pour la faire la plus courte possible. Je passais les mêmes passages en boucle. J’utilisais des documents didactisés. ET je n’y voyais aucun mal #stoplaculpabilisation #onfaitcequonpeut #libertepedagogique #meselevesdabord

Il vous faudra jongler entre français et anglais., sans honte ! Comprendre à l’écrit est finalement facile pour eux, j’entends pas là qu’ils ont déjà acquis des stratégies d’accès au sens au vu de leurs difficultés dans leur propre langue. C’est la production qui sera compliquée. Elle devra être ultra-guidée tant à l’écrit qu’à l’oral, et il vous faudra éviter les situations où tout n’est pas hyper cadré. Evitez l’improvisation, la création de phrase en autonomie (au moins pour les premiers mois), car la logique de la langue n’est pas évidente pour eux (je veux dire encore moins qu’avec vos élèves en difficulté du général).

Quinze minutes sur un document, avec des repérages de base c’est suffisant. Votre trace écrite se fera peut-être en plusieurs fois. Et elle sera peut-être préparée à l’avance également car peu de vos élèves seront à l’aise avec l’écrit. Prévoyez un temps conséquent pour le passage à l’écrit.

Pour ma part, ma préférence allait à des activités de manipulation 😉

De la manipulation ?

C’est en partie pour eux que je me suis orientée vers les flapbooks et les cahiers interactifs. C’est aussi pour eux que j’ai aimanté mes flashcards et fabriqué des dés de conversation. Découper et coller est déjà une difficulté pour eux, mais ils aiment prendre leur temps. Et découper, réfléchir, vérifier, coller, c’est un moyen pour apprendre de nouveaux mots, des structures de phrases, des notions culturelles sans en avoir l’air. Vive les dominos et les puzzles ! 

Si en plus vous pouvez travailler avec vos collègues en atelier pour fabriquer des outils de travail, ils seront encore plus motivés. Nous avons ainsi fait en 3e une séquence Lockers avec de vrais casiers fabriqués en atelier et décorés en atelier. Cette séquence restera un très joli souvenir, même si en anglais mes objectifs linguistiques (be/have/personality/likes/talents) étaient très limités pour un début de 3e.

De la même manière pour la prononciation, je passais par la poésie. Rien de mieux ! Et je les écrivais parfois moi-même ! 5 vers, 10 dans le meilleur des cas. On répétait, répétait, avec des petites voix, des grosses voix, on criait, on chuchotait. On s’amusait en sorte et on manipulait les mots pour dédramatiser l’oral.

Beaucoup de culturel

Tout faire pour les ouvrir au monde, c’était mon envie, mon credo. Et la partie culturelle, pouvait se faire en français d’ailleurs. A chaque fois que je le pouvais, je leur montrais comment leurs homologues britanniques ou américains, sud-africains, australiens, indiens, vivaient.

On travaillait sur l’emploi du temps, sur la nourriture, sur les affaires scolaires, sur les métiers, sur les couleurs … tout était prétexte à une petite vidéo ou une lecture sur le sujet, et nous en discutions en français. Pareil pour les actualités d’ailleurs, surtout quand un événement avait lieu.

J’ai commencé les flapbooks avec eux sur les grandes fêtes culturelles. On faisait des recherches pour créer une vidéo sur une fête en particulier. Cette séquence était très appréciée car accessible ! Et c’est la clé, rendre le culturel intéressant mais facile.

Et la grammaire ?

Avec eux, je n’en faisais pas. Non. Rien. Des blocs lexicalisés, à réutiliser. Point barre. Et ça marchait. On travaille sur les goûts : I like pour ce que j’aime et I don’t like pour ce que j’aime pas. Pourquoi ING, pourquoi pas tiens ! C’est comme ça. Ils pratiquaient, ils retenaient, ils imitaient. Je ne me fais aucune illusion sur le fait qu’aucun d’entre eux n’est devenu professeur d’anglais. Mais ils savaient en fin de 3e se présenter à quelqu’un et évoquer quelques événements personnels. Cela me suffisait. 

Ce qui a fini de me convaincre ? Leurs cours de français ! CE-CM maxi. Pourquoi vouloir leur imposer A2 voire B1 (#nanméoh) dans une langue étrangère ? Quel est l’enjeu ? L’égalité ? Je n’y crois pas une seule seconde. Nous différencions, et c’est bien normal. Alors je différenciais, et je donnais ce qu’ils pouvaient recevoir. Là non plus, aucun honte.

La gestion de classe Segpa

Le point d'achoppement

C’est ce qui fait le plus peur. Certains élèves sont TRES difficiles. La clé, pour moi, a été vraiment de me mettre à leur niveau, de baisser mes exigences de départ, de leur parler français, de les comprendre en somme. Ils restent des élèves TRES difficiles à gérer dans les matières générales. Mais, ce qui a été aussi, c’est de les suivre. En 6e je les habituais à ma façon de faire, en 5e je rabachais, en 4e j’étais écoutée et en 3e ça roulait tout seul. Une année en 4e ans en fait. 

Deux règles pas une de plus

Il n’y a que deux règles dans ma classe: on travaille et on se respecte. Avec mes élèves de SEGPA je les affichais au tableau. Et je rappelais à l’ordre ceux qui débordaient. C’était une lutte de tous les instants. Et là aussi ce que j’avais prévu de faire en 1h était fait en 2 ou 3. Qu’à cela ne tienne ! Comme me l’a dit très justement un collègue à mon arrivée en REP : d’abord pacifie ta classe ! On se fout de ce que tu vas raconter, il faut qu’on t’écoute, qu’ils s’écoutent d’abord. Ensuite tu travailleras. Dans les classes de général, ça m’a pris jusqu’en novembre cette année là (avec une rentrée mi-septembre pour cause de congé maternité), en Segpa jusqu’en mars. Tant pis. De l’énergie ça m’en a pris, mais je n’ai rien lâché. Et ça a payé ! 

Des récompenses

Avec eux, vive les stickers, les trucs à colorier, les petits cadeaux (posters, images …) ou récompenses de classe : si on arrive à finir cette activité, j’ai une petite vidéo rigolote à vous montrer ! On ira lire dehors ! (en Normandie c’était rare mais ils adoraient !) Je vous raconte un truc que j’ai fait quand j’étais à Londres.

Les ressources disponibles

Les rituels

Pour les rituels, j’utilisais le mot du jour. Je ne l’ai créé à l’époque que pour les 6e et 5e. Mais vous nous en avez réclamés pour tous les niveaux donc ils sont tous disponibles !

Les flapbooks

Les premiers flapbooks ont été créés avec les élèves de Segpa (et pour eux). Les fêtes calendaires les plus traditionnelles sont donc faisables dès la 6e (pas en autonomie ceci-dit, avec le professeur et en passant beaucoup par le français. Les posters culturels aussi nous servaient pour évoquer les événements du mois.

Les séquences

Malheureusement je n’ai que peu de séquences sur la boutique version Segpa. La boutique a été ouverte peu de temps avant que nous ne quittions la Normandie, et moi mes Segpa. Nous les mettons au fur et à mesure. Et la liste de vos demandes s’allongent 😉 Merci de votre confiance (et de votre patience).

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