La gestion de classe. Même s’il paraît évident à toute personne extérieure à notre métier que la gestion de classe est un élément primordial, nous n’y sommes pas véritablement formés. Et il faut en parler ! Voici le thème immense s’il en est des discussions tenues avec ma stagiaire.

Avant-propos
J’enseigne depuis un petit moment maintenant. Après un stage d’un an dans un collège tranquille du Finistère, j’ai connu les joies des remplacements. Les miens ont eu lieu en EREA avec 16h de segpa et 2h de CAP par semaine. Puis près de 10 ans en ZEP-APV-REP. Je suis de retour dans un collège agréable où la gestion de classe est moins au coeur de mon métier quotidien. Mais ces 10 ans m’ont permis de tester des techniques que j’ai plaisir à partager.
Des règles générales
Voici un petit pèle-mèle des règles qui me semblent fondamentales sur le sujet :
Gérez les élèves pas seulement dans la classe mais au sein de tout l’établissement : faites respecter les règles dans les couloirs, à la cantine, sur la cour. Montrez-vous pour exister auprès de vos élèves et incarnez à leurs yeux un professeur confiant.
Établissez des règles strictes et tenez-vous y quoiqu’il arrive : ne négociez pas, ne cédez pas et rappelez les au quotidien.
Fabriquez vos propres procédures en lien avec le règlement intérieur : travail non fait, retard, oubli de matériel, bavardages … Tout ce qui dérange votre cadre doit avoir une réponse adaptée, connue des élèves et appliquée à la lettre à chaque fois.
Évitez d’être pris au dépourvu et soyez sûrs de vous : vous avez la responsabilité de ceux qui sont en face de vous, ils doivent croire en vous. Alors commencez par le faire vous même.
Adaptez vos cours (pas vos règles) à vos élèves et différenciez au maximum : vous éviterez les perturbations, un élève doit être occupé et faire quelque chose. Inutile au début d’être trop ambitieux sur le contenu du cours, soyez le sur la forme, le minutage, les consignes.
En quelques mots, avant tout pacifiez votre classe.
Des anecdotes concrètes
Un baptême du feu
En 2007, je prenais mon premier poste fixe dans mon établissement ZEP. Je venais de donner naissance à notre aîné. Je n’ai repris qu’à la mi-septembre. On m’a forcée la main pour être professeur principale d’une classe de 5e. Et quelle classe ! 4 conseils de disciplines – et dans cet établissement, il fallait quasi attenter à la vie de quelqu’un pour y avoir droit. Ce fut une année baptême du feu. D’autant qu’une de mes classes de 3e était elle aussi bien gratinée.
Lorsque je suis arrivée dans la salle des profs, 15 jours après la rentrée, on m’a sautée dessus ! “Ah c’est toi la PP des 5A, faut qu’on se voit, ils sont infectes”.
Un conseil précieux
Et on m’a donné un conseil que j’ai suivi à la lettre jusqu’à la fin du 2e trimestre ! Car, on vous dira en formation que si votre cours est passionnant, vos élèves seront passionnés, attentifs, motivés et sages. Et que finalement les classes indisciplinées le sont car le professeur en face n’offre qu’un contenu médiocre. C’est un mensonge éhonté.
Bien sûr, je ne dis pas que la gestion de classe passe avant le contenu. Votre cours doit mener quelque part. C’est certain. En revanche, on ne peut pas faire cours, transmettre quoi que ce soit, sans un minimum de respect et de calme. Alors ne soyez pas trop exigeant avec vous-même sur les objectifs pédagogiques de vos séances. Veillez d’abord à instaurer un cadre, des procédures, des habitudes de travail. Vos élèves apprécieront d’avoir travaillé et appris quelque chose dans le calme, si petit votre objectif soit-il.
La construction de séquences qui déchirent, cela viendra après.

Une gestion de classe à la carte
Dans ce bahut, il y avait des jours, des semaines où bon nombre d’entre nous mettions notre “peau de con” et jouions le rôle du prof dur, strict et ferme. Pour notre salut, celui de nos élèves. C’est une autre technique apprise en EREA. Attention à ne pas être totalement vous-mêmes, à vous dévoiler de trop. Lorsqu’un incident se produit,c’est le prof qui était visé et pas vous la personne.
Alors il faut qu’il y ait une marge entre la personne que vos élèves connaissent et la personne que vous êtes. Je ne dis pas mentir, je dis cacher ; je ne dis pas jouer un rôle de composition mais forcer le trait. Ceux qui ne le font pas souffrent souvent plus car les remarques de leurs élèves attaquent leur personnalité, leurs émotions.
Aujourd’hui, la gestion de classe n’est plus problématique. Mes élèves sont plus calmes, l’établissement est plus serein. Les grands principes je les garde. Je suis plus moi-même avec eux que je ne pouvais l’être à mes débuts. Et c’est un autre métier. Parfois mes élèves de ZEP me manquent. Leur franc-parler, leur besoin de confrontation aussi.
Bienveillance et fermeté
Dans cet établissement précédent, à la demande de l’équipe pédagogique, nous avons suivi une formation sur l’adolescence. Pas celle que j’avais suivie à l’IUFM qui parlait boutons, poils et puberté précoce. Non. Cette formation, instructive et pratico-pratique, s’attachait à la relation adolescent-adulte. Le formateur, éducateur de terrain spécialisé dans la gestion des adolescents, nous a martelé le message suivant : “l’adulte c’est le cadre, l’ado va vouloir s’y confronter pour savoir s’il peut bouger. Ne bougez pas, l’ado vous respectera. Reculez et l’ado vous bousculera jusqu’à ce que vous pliez.”
A première vue, on pourrait trouver ce discours militaire, un peu psycho-rigide. Dans une école de la bienveillance, ces mots pourraient être mal interprétés. Mais il allait plus loin. Puisque bienveillance et maltraitance sont des opposés. C’est maltraiter un adolescent que de le laisser prendre le pouvoir, l’amenant à croire qu’il pourra décider de tout, de faire ce qui lui chante, quand cela lui plaît. C’est être bienveillant que de poser un cadre ferme et rassurant, qui ne bouge pas. La bienveillance c’est la fermeté.
Ce discours je me le suis approprié : pour moi l’essentiel est là. Avant d’être prof d’anglais, je suis prof tout court et je dois transmettre un savoir mais aussi des valeurs à mes élèves ; le respect est la première et je ne laisse aucun de mes élèves me manquer de respect, jamais, un point c’est tout. Ne vacillez jamais sur vos valeurs. Avant d’être prof, je suis maman et je suis persuadée qu’élever mes enfants selon un cadre clair et ferme, parfois strict, leur sera bénéfique.